Selon certaines prévisions, les employeurs devraient anticiper une directive européenne sur la transparence salariale. Pas sûr qu’ils soient pressés.
Une étude du cabinet de conseil WTW indique que les entreprises françaises prévoient cette année, un budget médian d’augmentations salariales de 3,5%. WTW a interrogé 1.000 sociétés de secteurs clés comme la vente, l’énergie, la finance, l’industrie, la tech, les médias ou la pharmacie. Les augmentations se répartissent en trois grandes enveloppes : des augmentations individuelles récompensant les performances, des augmentations collectives, et des augmentations de rattrapage, destinées à corriger les écarts de salaire injustifiés.
En théorie…
Cette dernière enveloppe pourrait être conséquente en 2025. Selon Khalil Ait-Mouloud, directeur de l’activité enquêtes de rémunération chez WTW, l’un des principaux moteurs pour des augmentations en 2025 est: «le renforcement des initiatives en matière de diversité, d’équité et d’inclusion, notamment à la veille de la transposition de la Directive Européenne sur la transparence des rémunérations, en juin 2026 au plus tard, et qui viendrait renforcer les obligations des entreprises en termes d’équité salariale et professionnelles »
En théorie, les entreprises ont en effet intérêt à faire des rattrapages en 2025 pour ne pas être prises au dépourvu quand viendra l’application de la directive en France. Cette directive européenne, qui doit être transposée en France en juin 2026, vise à « renforcer l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes pour un même travail ou un travail de même valeur par la transparence des rémunérations».
Ce texte de la commission Européenne crée un droit pour les salarié.es de demander et obtenir le niveau moyen de salaire des personnes ayant un poste équivalent au leur dans l’entreprise. Ce qui permettra aux femmes de prouver les écarts de salaire avec leurs homologues masculins et de demander des ajustements si nécessaire. Une démarche particulièrement difficile en France où la question est encore taboue. Mais à partir de 2026, les salariées pourront se saisir des informations rendues obligatoires pour porter plainte et obtenir des indemnisations le cas échéant.
… en pratique
Cette perspective va-t-elle déclencher une vague d’égalité salariale entre femmes et hommes en 2025 ? Rien n’est moins sûr. Les entreprises avancent toujours très mollement sur ce sujet. L’acceptation sociale des discriminations salariales au détriment des femmes est encore très forte, les employeurs n’ont jamais trop de difficultés à contourner les contraintes et ils n’ont jamais pris les devants pour faire advenir l’égalité.
Au moins six lois sur l’égalité professionnelle ont été adoptées en France depuis les années 70 et on en est toujours à des écarts de salaires de l’ordre de 24 % globalement et près de 5% à poste équivalent. La dernière initiative gouvernementale, l’index de l’égalité, devait obliger les entreprises à s’améliorer en mesurant chaque année quelques indices. Mais comme les entreprises ne risquaient aucune sanction, sauf cas extrêmes, elles ont utilisé l’index comme passeport pour ne rien améliorer.
Lire : Egalité professionnelle : le revers de l’index
Quand la transparence sera obligatoire, s’il n’y a pas quelques courageuses pour se lancer dans des procès contre leurs employeurs, il n’est pas certain que ces employeurs changeront leurs habitudes. Jusqu’à présent, seules quelques rares actions de groupe ont provoqué des remises en question. Mais elles sont rares.
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