
Publier des livres pour enfants, pour « tordre le cou aux clichés sexistes ». C’est il y a cinq ans que deux femmes, Laurence Faron et Mélanie Decourt, ont concrétisé leur ambition. Elles se sont rencontrées dans le milieu de l’édition scolaire où elles travaillaient. La première était auparavant passée par le droit et la finance, la seconde par l’association Mix-Cité. Toutes deux mues par des convictions féministes, tout autant que par l’envie d’entreprendre, elles ont choisi de créer leur propre maison d’édition. Un an après la naissance juridique de Talents Hauts, les premiers livres étaient publiés fin 2005.
Une ambition commune : combattre les stéréotypes, explique Laurence Faron
Laurence Faron s’en désole : les clichés sexistes imprègnent toujours très fortement la littérature pour enfants. Lui joue au foot, elle à la poupée. Papa va au travail, maman fait la cuisine… La fille passive / le garçon vaillant : le modèle trouve évidemment sa source dans les plus célèbres contres de fées.
Prenez « La Belle au Bois dormant » :
Les éditions Talents Hauts revendiquent ainsi des albums « 100% sans sexisme ». Où l’homme enfile les gants de vaisselle et la femme les gants de moto, où les filles rêvent de jouer à Tarzan et les garçons à la poupée. La maison d’édition propose deux collections : des albums pour les 3-7 ans et les romans illustrés « Livres et égaux » pour les plus grands enfants. Tous obéissant à ce cahier des charges : faire passer le message de l’égalité filles/garçons. « Des histoires de liberté, de respect de l’autre, de respect du choix de chacun », résume Laurence Faron.
Mais pas question de ne penser qu’au message. D’ailleurs, d’un album à l’autre, les styles graphiques et narratifs sont extrêmement variés. Pour Laurence Faron, il s’agit tout autant de faire des beaux livres, et qui se vendent.
En somme, réussir « un dosage entre convictions militantes et fibre entrepreneuse » :
Revendiquer ainsi son féminisme n’est évidemment pas fédérateur. Le terme suscite toujours nombre de réactions négatives. Laurence Faron reconnaît se priver ainsi d’une partie du marché.
Mais nuance aussitôt : ce positionnement aide aussi Talents Hauts à se faire remarquer
Se distinguer : une nécessité dans la jungle du marché de l’édition jeunesse, dont les 12 plus gros éditeurs se partagent les deux tiers. Et où le nombre de publications ne cesse d’augmenter, pour dépasser les 12 000 l’an dernier. Avec une centaine de titres au catalogue, du haut de ses 4 ans, Talents Hauts est encore un petit éditeur. Mais « en pleine croissance », et sans crainte de l’avenir, assure Laurence Faron. Car « il y a toujours de la place pour les gens qui ont quelque chose à dire ».
Talents Hauts propose depuis ses débuts une autre ligne éditoriale unique : des livres bilingues français/anglais, sans traduction. Des dialogues dans les deux langues pour les plus petits, et pour les plus grands (et adultes) des romans avec des chapitres alternés en français et en anglais. Des livres où « tout est fait pour que le lecteur comprenne sans tricher et sans s’ennuyer », promet Laurence Faron.