Après 22 mois de lutte, les femmes de chambre employées par un sous-traitant ont obtenu un accord.
Le 17 juillet 2019, dix-sept femmes de chambre, deux gouvernantes et un équipier de l’hôtel Ibis Batignolles de Paris entamaient une grève et un mouvement de lutte. 22 mois après, dont huit de grève et 14 d’activité partielle, un accord négocié entre la CGT des hôtels de prestige et économiques (CGT-HPE), AccorInvest, la foncière immobilière d’Accor, et STN, le sous-traitant du nettoyage employeur des salariés a signé la fin de ce long et rude combat de femmes mardi 25 mai 2021.
La direction de la société STN, à qui Accor sous-traite l’entretien des chambres, a fini par céder sur presque toutes les demandes. Ce sous-traitant, en charge du ménage dans l’établissement trois étoiles depuis 2016, imposait à ses employées des cadences intenables – 15 minutes par chambre-, des heures supplémentaires non payées, un paiement « à la chambre » illégal, des contrats précaires, des salaires très faibles…
Avec cet accord, les femmes de chambre ont obtenu une baisse des cadences « indicatives » (passant de 3,5 chambres nettoyées par heure à 3 chambres), une augmentation salariale de de 200 à 500 € par mois, des primes de paniers repas à 7,30€, l’augmentation de leurs qualifications, le passage de sept personnes à temps complet, l’annulation des mutations prévues ou encore la fin des contrats de 4h.
C’est le bruit qui a payé. Les grévistes et syndicats n’ont pas ménagé leur peine pour dénoncer cette précarité infligée aux femmes et en particulier à celles issues de l’immigration. Pendant les 22 mois de lutte, ces battantes ont, à plusieurs reprises, sorti les banderoles, tambours et mégaphones devant les établissements du groupe hôtelier au centre de Paris et chanté leur l’hymne. Elles dénonçaient : « la sous traitance, c’est la maltraitance ! ».
Cette victoire symbolise aussi un début de reconnaissance du travail jusque-là invisible des femmes et particulièrement des travailleuses d’origine immigrée. L’avocat des employées, Slim Ben Achour demande d’ailleurs la reconnaissance du « préjudice moral lié à la discrimination sexuelle et raciale ».
Lorsqu’elles avaient saisi les Prud’Hommes le 16 décembre 2020, elles dénonçaient ainsi : « Le travail de « femme de chambre » est de facto vu comme un travail féminin au même titre que les tâches ménagères, gratuites depuis des siècles. Le recrutement dans les sociétés de nettoyage se fait par bouche-à-oreille et la cooptation. Une grande partie des salariées ne savent ni lire ni écrire et parlent mal le français. Les femmes de chambre sont toutes originaires d’Afrique subsaharienne. ACCOR a mis en place un système opaque et complexe pour disposer d’une main-d’œuvre ultra flexible et corvéable sur laquelle une pression constante est exercée. »
Ce n’est pas le premier combat des femmes de chambre employées par des sous-traitants. Et rien ne dit que ce sera le dernier…
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