
Sheryl Sandberg en 2012. Par World Economic Forum [CC BY-SA 2.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/2.0)], via Wikimedia Commons
« Nous voyons à présent ce qui arrive quand le pouvoir est presque exclusivement aux mains des hommes », analyse Sheryl Sandberg, réagissant aux implications de l’affaire Weinstein.
« La campagne présidentielle de 1992 a parfois été résumée par une phrase [de Bill Clinton, NDLR] : ‘C’est l’économie, imbécile’. Aujourd’hui, alors que les gros titres de la presse ne cessent de faire état de cas de harcèlement et d’agressions sexuelles au travail, une phrase similaire me vient à l’esprit : ‘C’est le pouvoir, imbécile ».
C’est ainsi que débute le long texte publié par Sheryl Sandberg dimanche 3 novembre. La numéro 2 de Facebook explique n’avoir jamais subi de harcèlement sexuel de la part de supérieurs directs, mais cela lui est arrivé de la part d’autres hommes dans le cadre de son travail. De celui qui a posé sa main sur sa cuisse lors d’une réunion ou de cet autre, rencontré lors d’une conférence, à qui elle a refusé un dîner et qui est venu frapper à la porte de sa chambre d’hôtel jusqu’à ce qu’elle appelle la sécurité.
Tous avaient un point commun : « Ils avaient davantage de pouvoir que moi », écrit Sheryl Sandberg. « Ce n’est pas une coïncidence. C’est pour cela qu’ils se sont sentis autorisés à franchir la ligne jaune ».
Celle qui dénonce depuis des années les qualificatifs négatifs associés aux femmes de pouvoir salue donc la vague qui ne cesse de déferler depuis l’affaire Weinstein. « Nous voyons à présent ce qui arrive quand le pouvoir est presque exclusivement aux mains des hommes. Cela favorise un environnement où, dans le pire des cas, les femmes sont traitées comme des corps à lorgner ou à tripoter, plutôt que des égales à respecter ».
« Il faut que davantage de femmes aient davantage de pouvoir »
L’autrice en 2013 du manifeste Lean In poursuit : « Pour la première fois dans ma vie professionnelle, il me semble que les gens sont prêts à tenir les agresseurs pour responsables. Je m’en réjouis – à la fois en tant que celle que je suis aujourd’hui, et en tant que la jeune personne que j’étais et qui a dû se jeter sur la porte de sa chambre d’hôtel pour la fermer à double tour ».
Mais il ne suffit pas de s’en réjouir, insiste Sheryl Sandberg : il faut changer la culture d’entreprise, créer des mécanismes efficaces faire en sorte que les femmes se sentent en sécurité. Et il faut rester vigilant, car elle assure avoir « déjà entendu les grondements d’un backlash », un retour de bâton, avec des remarques du genre : « Mieux vaut ne pas embaucher de femmes ». Au contraire, avertit-elle : « Au bout du compte, ce qui sera le plus efficace pour changer notre culture, c’est ce sur quoi j’écris et dont le parle depuis bien longtemps : il faut que davantage de femmes aient davantage de pouvoir ». De même que « tous les groupes sous-représentés. »
« Cela ne résoudra pas tous les problèmes », conclut Sheryl Sandberg, « mais une chose est sûre : on verrait beaucoup moins de personnes se faire tripoter en faisant leur travail. Et ce serait un grand pas dans la bonne direction ».