Parmi les cinq films français qui figurent dans le classement des 100 meilleurs films du XXIe siècle du New York Times, trois sont réalisés par des femmes. Pourtant, les réalisatrices françaises sont largement sous-financées par le CNC. Et, globalement ce Top 100 ne compte que 12 réalisatrices.

Quels sont les chefs-d’œuvre cinématographiques marquants du XXIème siècle ? Le New York Times s’est donné pour mission d’établir un classement des 100 meilleurs films réalisés pendant ce premier quart de siècle.
Parmi la centaine de films qui figurent dans cette prestigieuse sélection, cinq sont des films français, dont trois réalisés par des femmes. C’est Justine Triet la première Française à apparaître dans ce classement, à la 26ème place, pour Anatomie d’une chute (2023). La deuxième à figurer dans ce top 100 : Céline Sciamma pour son film Portrait de la jeune fille en feu (2019), classé 38ème. Enfin, Agnès Varda est classée 88e pour son film Les Glaneurs et la Glaneuse (2001).
Moins de 30% de femmes à la direction de films soutenus par le CNC
Avec ce classement, le New York Times affirme que, si le cinéma français rayonne à l’international, c’est surtout grâce ses réalisatrices. Des réalisatrices d’autant plus méritantes que le 7ème art en France est pétri d’inégalités structurelles persistantes. En 2024, le bilan de la production cinématographique, publié par le Centre National du Cinéma (CNC), révèle que la part de femmes ayant dirigé le tournage d’un des 309 films français agréés n’est que de 29,6 %, soit une faible hausse de 1,2 point par rapport à 2023. Mais le CNC note une tendance à la baisse puisque cette proportion était de 30% en 2021 et de 30,7 % en 2022. Pour ce qui est des films d’initiative française (soit 231 films), sur les 253 cinéastes qui ont dirigé le tournage, 187 sont des hommes (73,9 %) et 66 sont des femmes (26,1 %). Lors de son bilan de l’année 2023, le CNC avait eu le culot d’écrire en titre de la partie consacrée à la « Répartition des réalisateurs de films agréés selon le genre » : « Une part de femmes réalisatrices en recul mais qui se maintient à un niveau élevé. », alors même qu’elle ne dépassait pas les 30%. Cette fois-ci, il reconnaît que la part de réalisatrices reste « très minoritaire ».
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Et ces presque 30 % sont récents. Pendant le siècle observé par le New York Times la proportion de films de réalisatrices soutenus par le CNC était plutôt de 20 %… et il fallait s’en réjouir. En 2020, lors des assises du collectif 50/50, Agnès Jaoui racontait qu’à 30 ans , elle était très fière de clamer, à l’étranger, que 20 % des films en France étaient faits par des réalisatrices. Puis quelques années plus tard elle faisait remarquer que 80 % étaient réalisés par des hommes. « Quelle puissante acceptation de mon infériorité m’avait fait me réjouir d’un chiffre aussi minable ?» se demandait-elle alors.
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Femmes largement minoritaires dans le Top 100
Si les films français présents dans le classement du New York Times affichent une certaine parité, avec trois films réalisés par des femmes sur les cinq, les femmes restent largement minoritaires dans ce top 100. Seulement douze réalisatrices y figurent.
C’est à la 15ème place que la première femme apparaît : la réalisatrice brésilienne Kátia Lund, aux côtés de Fernando Meirelles, pour leur film La Cité de Dieu (2002). Il faut ensuite attendre la 26ème place pour qu’une femme soit citée en solo, en l’occurence Justine Triet. On retrouve ensuite Sofia Coppola (30e), Céline Sciamma (38e), Greta Gerwig (39e), Maren Ade (59e), Valerie Faris (63e), Kathryn Bigelow (68e), Charlotte Wells (78e), Celine Song (86e), Agnès Varda (88e), Andrea Arnold (91e).
En 1971, dans un essai pionnier de l’histoire féministe de l’art, l’historienne Linda Nochlin pose la question : Pourquoi n’y a-t-il pas eu de grands artistes femmes ? Si son étude porte davantage sur la peinture, elle décortique une certaine conception collective du génie artistique. Un statut réservé aux hommes et qui ne se conjugue que de très rares fois au féminin. Le classement du New York Times, qui estime que sur les 100 chefs d’œuvres cinématographiques du XXIe siècle seulement 12 ont été réalisés par des femmes, prouve une nouvelle fois que le système patriarcal continue de façonner nos imaginaires.
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