Pour éviter l’attente aux toilettes pour femmes, une festivalière se munit d’un « pisse-debout » et utilise les urinoirs du festival Musilac, à Aix-les-Bains. La sécurité l’arrête et l’exclut du festival.

Pendant un festival, lorsqu’une femme a envie d’uriner, deux possibilités s’offrent à elle. Option 1 : subir la queue interminable pour les toilettes des femmes. Option 2 : utiliser un pisse-debout, une sorte d’entonnoir qui permet aux femmes d’uriner debout. C’est vers cette deuxième option que s’est tournée Julia, 27 ans, festivalière à Musilac, festival de musique organisé à Aix-les-bains du 9 au 12 juillet. Dans la soirée du 10 juillet, la jeune femme s’est rendue aux urinoirs et a dégainé son pisse-debout. Mais la sécurité l’a interrompue, pendant qu’elle était en train d’uriner, précise-t-elle, et l’a exclue du festival.
Des urinoirs interdits aux femmes
Abasourdie par ce qui lui est arrivée, la festivalière partage son témoignage sur Reddit. « J’ai vécu une situation assez surréaliste ce week-end au festival Musilac à Aix les bains, et je ne sais pas trop si ce que j’ai subi est légal ou pas », confie-t-elle. Elle poursuit : « Le festival en question avait des urinoirs collectifs extérieurs, clairement conçus pour les personnes ayant un pénis. J’avais sur moi un dispositif pisse-debout qui me permet d’utiliser ce genre de toilettes sans m’exposer ni me mettre dans une position inconfortable ou dangereuse. J’ai donc utilisé un urinoir, discrètement, sans me déshabiller ni faire quoi que ce soit d’inapproprié ».
Pourtant, des agents de sécurité viennent l’interpeller. « Ils m’ont demandé de quitter les lieux en prétendant que c’était “interdit” pour une femme d’utiliser ce type de toilettes », rapporte-t-elle. Pourtant, ce soir-là, elle n’était pas la seule femmes à utiliser les urinoirs, témoigne-t-elle auprès du service Checknews du journal Libération.
La révolution du « pisse-debout »
Encore trop méconnu, le « pisse-debout » est une invention qui permet à toutes les personnes n’ayant pas de pénis d’uriner debout grâce à un système d’entonnoir. Une véritable révolution qui évite de faire l’équilibriste au-dessus d’une cuvette salle ou encore de subir le temps d’attente pour accéder aux toilettes des femmes. « J’avais pris mon pisse-debout parce que je connais Musilac, c’est toujours une galère, avec une queue astronomiquement longue pour accéder aux toilettes, précise Julia.
Deux chercheurs belges de l’université de Gand, Kurt Van Hautegem et Wouter Rogiest, ont fait l’expérience. Sur une surface égale, les urinoirs prennent moins de place que des toilettes, ce qui permet de faire rentrer 20 à 30% de toilettes supplémentaires selon les chercheurs. Ils ont donc installé 12 toilettes pour hommes (deux cabinets fermés et 10 urinoirs) contre 10 toilettes pour femmes. Résultat : les femmes attendent en moyenne 6,19 minutes contre 11 secondes pour les hommes. Le pisse-debout se présente alors comme une véritable révolution !
Les festivals doivent s’adapter aux festivalières
Après l’incident, et surtout sa médiatisation, les organisateurs de Musilac ont présenté des excuses à Julia et lui ont proposé le remboursement de son billet, comme elle l’explique à plusieurs médias. Mais la jeune femme reste indignée de ce qui lui est arrivé : « Le problème c’est qu’ils ne m’ont pas contactée tout de suite. J’ai eu un retour après avoir publié mon témoignage sur Reddit et après avoir échangé avec des journalistes. Alors que j’avais immédiatement écrit au festival. »
Alors que les femmes cherchent leur juste place dans les festivals, sur scène comme dans le public, cet incident est encore la preuve que l’espace public n’est pas pensé pour les femmes, voire il leur est hostile. Mais quelques festivals montrent qu’une alternative est possible. En 2019, le festival We Love Green avait installé des urinoirs spécifiquement pour les femmes. Même dispositif à Marsatac, à Marseille. Autre progrès : aux Eurockéennes, festival de musique organisé à Belfort, un stand de prévention distribue des « pisse-debout ».
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