Le gouvernement entend réserver 10% des places en crèches aux enfants les plus pauvres. Une réponse aux inégalités sociales : dans les 20% de familles les plus pauvres, 92 % des enfants de moins de 3 ans sont gardés principalement par leurs parents.
« Il faudra désormais que les crèches accueillent au minimum 10% d’enfants pauvres ». C’est ce qu’a déclaré le Premier ministre, dévoilant une des mesures qui seront prises, lundi 21 janvier, par le comité interministériel de lutte contre l’exclusion. Ce quota devra être inscrit dans la nouvelle Convention d’objectifs et de gestion (COG) entre l’État et la CNAF pour la période 2013-2016, qui doit être signée d’ici au printemps 2013. La ministre de la Famille doit par ailleurs en présenter en février les grandes orientations.
Une mesure approchante est déjà en place depuis une loi de 2006, rappelait le groupe de travail chargé de l’enfance, qui avait planché en amont de la conférence nationale de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale, en décembre 2012. Selon la loi, les établissements d’accueil du jeune enfant doivent en principe réserver une place sur vingt aux enfants de bénéficiaires de minima sociaux reprenant un emploi.
Pauvretés
Pour autant, « il n’existe pas d’évaluation de cette disposition, mais les acteurs de terrain font souvent état d’une faible effectivité » relevaient les experts du groupe de travail qui préconisait alors dans son rapport de modifier cette disposition en « prévoyant que les établissements d’accueil du jeune enfant reçoivent une proportion d’enfants sous le seuil de pauvreté correspondant à leur proportion dans la population (soit 20 % en moyenne nationale).
Cette moyenne de 20% évoquée par le groupe de travail apparaît toutefois surévaluée. La dernière étude de l’Unicef comptabilisait 8,8% d’enfants pauvres si l’on considère la « pauvreté relative », ou 10,1% en situation de privation – sachant que ces deux façons de prendre en compte la pauvreté se recoupent en bonne partie (1). Le taux de privation double pour les enfants issus de familles monoparentales : il s’élève à 21,5% (Lire : Pauvreté et inégalités des enfants français).
Disparités territoriales et sociales
« A terme, les crèches devront accueillir la même proportion d’enfants issus de familles pauvres que ce qu’ils représentent dans leur commune », a précisé le Premier ministre. Reprenant là ce que préconisait le groupe de travail : « A moyen terme, l’objectif serait, comme c’est notamment le cas à Grenoble, que le pourcentage d’enfants de familles en situation de pauvreté accueillis dans la crèche soit voisin de leur proportion dans la population. »
L’offre d’accueil en crèche varie, selon les départements, de 4,6 à 39 places pour 100 enfants de moins de 3 ans, selon les chiffres publiés en décembre 2012 par la CNAF (Lire : Petite enfance, des politiques et des chiffres). Disparités territoriales, mais aussi sociales : selon une étude de la DREES (datant de 2007), dans les 20% de familles les plus pauvres, 92 % des enfants de moins de 3 ans sont gardés principalement par leurs parents. Seuls 4 % de ces enfants sont gardés dans une crèche.
(1) On considère qu’un enfant est en situation de « pauvreté relative » s’il vit dans un ménage dont le revenu est inférieur à 50% du revenu médian par ménage. Il est en situation de « privation » s’il n’a pas accès à au moins deux de 14 éléments essentiels au bien-être et au développement ; par exemple le fait de manger des fruits et légumes frais tous les jours, de disposer à la maison de livres adaptés à son âge ou encore de pouvoir profiter d’un endroit calme avec de l’espace pour faire ses devoirs.