La précarité sociale stigmatise ; elle doit devenir un critère de discrimination inscrit dans le Code pénal, « pour être mieux combattue ». C’est la revendication d’ATD Quart Monde, rejoint par une quarantaine d’associations.
« Dans le contexte actuel de crise, les idées reçues véhiculées sur les personnes qui subissent la pauvreté et le mépris qu’elles inspirent, peuvent mener au fait qu’on prend les gens pour des incapables dans certains domaines (présomption d’incapacité), entraîner des traitements différents et finalement des refus de droits ». C’est ce que rappelle l’association ATD Quart-Monde, à l’occasion de la journée mondiale du refus de la misère, jeudi 17 octobre.
C’est pourquoi l’association milite pour que la « précarité sociale » devienne un motif de discrimination prohibé par l’article 225-1 du Code pénal, comme le sont déjà 19 autres, tels que l’origine ethnique, le sexe, l’âge ou même l’apparence physique. Une combat qu’elle mène depuis plusieurs années déjà (Voir : La grande pauvreté, discriminante pour ATD Quart Monde).
Testings révélateurs
L’association a menée cette année une opération de testing de grande ampleur : l’envoi de 1 440 CV, de deux types, pour des emplois d’opérateur de caisse dans différentes grandes villes. Seule différence entre les deux types de CV : l’un d’eux mentionnait une adresse en centre d’hébergement et un passage par une entreprise d’insertion .
Seuls 53% de ces derniers ont reçu une réponse positive pour un entretien, alors que 83% des CV neutres ont été reçus positivement. Un écart de 30 points au détriment des candidatures portant des signaux de précarité.
Ce constat s’ajoute à d’autres observations similaires. Dans le domaine de la santé, par exemple, « plusieurs enquêtes ont montré que les patients bénéficiaires de la CMU ont moins de chance que les autres d’obtenir un rendez-vous chez un médecin, particulièrement chez un spécialiste », souligne l’association.
L’appui de la CNCDH
Faire que « la discrimination pour cause de précarité sociale soit reconnue dans la loi, pour être mieux combattue » : avec ATD Quart Monde, ce sont aujourd’hui une quarantaine d’associations qui portent cette revendication, par l’intermédiaire de cette pétition.
Dans un tout récent avis, publié le 9 octobre, la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) allait également dans ce sens. Elle écrivait : « L’ajout d’un vingtième critère de discrimination dans l’article 225-1 du code pénal aurait pour mérite de reconnaître le préjudice subi par les personnes en situation de précarité sociale, et de faire comprendre aux discriminants que leur comportement ou discours ne sauraient être tolérés dans un Etat de droit. Ce critère permettrait de faire prendre conscience à l’ensemble de la société de la gravité de certains comportements qui stigmatisent et aboutissent à discriminer les personnes pauvres. »