Une enquête révèle des chiffres effrayants sur les violences sexuelles chez les étudiant.es. La cause principale n’est pas l’alcool. L’éducation est urgente.
En France, une étudiante sur vingt dit avoir été victime de viol, une sur dix victime d’agression sexuelle, c’est ce qui ressort d’une vaste enquête menée par l’Observatoire étudiant des violences sexuelles et sexistes dans l’Enseignement supérieur, menée en 2019 dans une cinquantaine d’universités, prépas, grandes écoles, BTS, DUT... 9624 personnes ont répondu, 76% femmes et 24% hommes.
34% des étudiant.es disent avoir été victimes ou témoins de violences sexuelles. Ces violences se déroulant plutôt en soirée ou en week-end hors du campus, lors d’une fête étudiante.
Le questionnaire ne donnait pas de guide précis (pas de question à choix multiple) pour répondre à la question : «Selon vous, quelles sont les principales causes des violences sexuelles (agression et sexisme) dans votre établissement ? » et, les principales réponses ont été : L’effet de groupe (20%), l’impunité (18%), la consommation excessive d’alcool (18%) et le manque d’éducation des étudiants (18%).
Cependant, la dépêche AFP qui rend compte de cette étude retient avant tout « l’effet de groupe » et l’alcool comme cause de ces violences. Et cette dépêche a été reprise dans nombre de journaux. Ce qui laisserait penser qu’il faudrait agir sur la consommation d’alcool pour faire baisser le niveau de violence sexuelle. Or deux réponses sont au même niveau que l’alcool : l’impunité et le manque d’éducation.
C’est sur ces deux ressorts qu’il faudrait agir. Le rapport le rappelle : « Des actions doivent être menées afin de faire comprendre aux étudiantes et étudiants que l’alcool n’est jamais la cause des violences et n’excuse aucun acte, l’agresseur est toujours responsable de ses actes. » Des actions d’éducation donc.
Le questionnaire a voulu évaluer la capacité à identifier des situations de violences sexuelles ou sexistes en soumettant des cas pratiques suivis de questions : « La victime peut-elle porter plainte ?» Et de ces propositions de réponses : «Ça va, il ne faut pas exagérer ! – Non – Oui – Je ne sais pas». Puis « Si oui pour quel motif ? Harcèlement moral – Harcèlement sexuel – Agression Sexuelle – Viol ». Il apparaît que les situations de viol sont bien identifiées dans plus de 90 % des cas. Mais la réponse «Ça va, il ne faut pas exagérer !» est cochée par 4 % des hommes et 1 % des femmes.
L’étude montre aussi que les hommes ont moins conscience du « sexisme » présent dans leur établissement que les femmes, 35 % des hommes questionnés considèrent leur établissement comme égalitaire contre 27 % des femmes. La prise de conscience augmente au fil des années d’études. « 58% des étudiantes et étudiants en première année ne considèrent pas le contexte de leur établissement comme égalitaire, ce chiffre s’élève à 77% pour les étudiants en 5ème année et en doctorat et à 96% pour les professeurs » précise l’enquête.
Les établissements qui accueillent les étudiants font-ils de la prévention? Des cellules de veille contre le harcèlement et les violences sont obligatoires dans les universités et écoles d’enseignement supérieur mais elles n’existent pas encore partout. Un quart des étudiant.es ne savent s’il en existe une et 18 % considèrent qu’il n’en existe aucune.
« Il est urgent de développer des actions de sensibilisation et de lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans l’enseignement supérieur» conclut le rapport qui insiste : « les études sur les violences doivent permettre de travailler en collaboration avec les acteurs politiques, institutionnels, les associations et les étudiant.es pour mettre en place des dispositifs efficaces de lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans l’enseignement supérieur.»
Parce que « la minimisation et la banalisation des violences sexuelles et sexistes dans l’enseignement supérieur se répercutent dans le monde du travail et la future vie professionnelle des étudiantes et étudiants.»