Depuis plus de 10 ans, le bien-être des Français progresse moins vite que la croissance économique, observe le CREDOC.
« Le bien-être progresse-t-il moins vite que le produit intérieur brut ? » C’est la question que pose le CREDOC dans sa lettre « Consommation et mode de vie » du mois de juillet. Et la réponse est claire : « Oui ».
Depuis le début des années 2000 en France, l’évolution du bien-être ne suit pas celle du PIB. Pour aboutir à ce constat, le CREDOC (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie) a composé un indicateur de bien-être (voir encadré ci-dessous).
Résultat : de 1988 à la fin des années 1990, la courbe de cet indicateur de bien-être suit celle du PIB. Mais depuis le tournant des années 2000 le PIB augmente davantage. Sur une base de 100 pour chacun de ces deux indicateurs en 1988, le PIB atteignait 149 en 2012, et le bien-être seulement 135.
Dans certains domaines, le niveau de bien-être a toutefois largement progressé. « Le niveau d’éducation a crû, l’équipement du foyer s’est amélioré, la qualité des logements a progressé, le lien social s’est renforcé et les pratiques de loisirs se sont développées », note le CREDOC.
Mais d’autre indicateurs sont « dans le rouge ». Si le pouvoir d’achat a progressé de 35% sur les 30 dernières années, les dépenses contraintes sont de plus en plus lourdes. Et les inégalités entre hauts et bas revenus se sont accrues. Si bien qu’actuellement, « 70 % des Français ont le sentiment de faire partie des classes sociales inférieures, contre 60 % en 1999. ».
Dans le même temps, l’insécurité professionnelle progresse, les Français « ont plus souvent l’impression d’être en mauvaise santé et sont plus perméables au sentiment d’insécurité. »
Selon le CREDOC, ce « décrochage » du bien-être par rapport au PIB, au tournant des années 2000, « correspond à la période qui suit l’éclatement de la « bulle Internet » et où sont apparus, dans l’opinion, une insatisfaction croissante vis-à-vis du pouvoir d’achat, un enracinement du sentiment de déclassement social, une défiance plus prononcée à l’égard des institutions et une attirance plus marquée pour le radicalisme politique. »
Avec ce travail, le CREDOC s’inscrit dans la lignée des recommandations de la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi. « De nombreux décideurs publics, économistes ou commentateurs ont, en permanence, les yeux rivés sur les variations du PIB. Pourtant, les critiques se multiplient contre cette tentation de réduire à un indicateur économique les multiples dimensions du bien-être des populations », note l’organisme. Voir notre dossier : « Bien-être et croissance » Le CREDOC a établi son indicateur de bien-être, alimenté par les données de l’enquête « Conditions de vie et Aspirations » depuis 1988, comme « une moyenne pondérée de 11 dimensions (comprenant au total 60 variables) tenant compte de la situation financière , du patrimoine, de l’équipement du foyer, des conditions de logement, des loisirs et du temps libre, de la situation professionnelle, de la participation à la vie citoyenne, de l’état de santé ressenti, du lien social, du sentiment de sécurité et du niveau d’éducation. » |