Incroyable argument dans les amendements de LR contre l’allongement du congé paternité. Une sorte d’aveu d’acceptation de discrimination envers les femmes.
L’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2021 a commencé au Sénat lundi avec près d’un millier d’amendements au menu des discussions. Deux d’entre eux visent à diminuer la portée de l’allongement, très relatif, du congé de paternité annoncé de façon tonitruante par le président de la République. Fin septembre en effet, Emmanuel Macron communiquait fortement sur cette disposition qui devait porter ce congé à 28 jours, dont sept seulement seraient obligatoires (contre trois jours de « congé naissance » aujourd’hui). Ce qui n’améliorerait pas vraiment l’égalité femmes/hommes dans les responsabilités parentales et au travail.
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Deux amendements, proposés par Les Républicains (LR), veulent atténuer encore la disposition déjà adoptée par l’Assemblée nationale. Dans un souci de protection des petites entreprises et, plus surprenant, de prévention des discriminations envers les jeunes pères. Le premier amendement, signé par 39 sénateurs LR, veut que le congé de sept jours ne soit pas obligatoire.
Le deuxième, cosigné, lui, par 25 sénateurs LR, propose d’ «instaurer une période minimale d’ancienneté de la part du père » et veut que l’allongement du congé paternité «ne s’applique qu’aux salariés titulaires d’un CDI ou d’un CDD d’un minimum de six mois dans la même entreprise». Les sénateurs justifient cet amendement par un premier argument convenu : «pour une TPE ou une PME, il est particulièrement nécessaire de pouvoir anticiper l’absence d’un de ses collaborateurs». Le second argument est plus surprenant : exiger un certain temps de présence dans l’entreprise avant de pouvoir bénéficier de ce congé permettrait d’éviter, selon les sénateurs LR, «une nouvelle forme de discrimination à l’embauche pour les nouveaux pères salariés de l’entreprise».
Il manque une étape dans leur raisonnement. Quand les défenseur.es de l’égalité des sexes réclament l’allongement du congé de paternité, c’est précisément pour éviter une discrimination à l’embauche des femmes. Parce que les employeurs considèrent qu’il y a un « risque maternité », ils préfèrent souvent embaucher des hommes. L’allongement du congé paternité mettrait tout le monde à égalité face aux employeurs. Cela fait des années que des tentatives de législation s’élaborent dans ce sens en France et en Europe, avec l’argument de l’égalité femmes/hommes au centre du propos. Les conservateurs s’y opposent ou se dérobent quand l’objectif est de ne pas discriminer les femmes au travail. Voici qu’ils se réveillent quand des hommes risquent d’être discriminés. Leur argumentation sonne comme un aveu d’acceptation des discriminations des femmes à l’embauche.
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