Entre le « réarmement démographique » d’Emmanuel Macron et le Forum économique mondial qui s’intéresse à la santé des femmes pour favoriser la croissance économique, les utérus n’ont qu’à bien se tenir.

« Notre France sera aussi plus forte par la relance de sa natalité » : dès le début de sa conférence de presse du 16 janvier, Emmanuel Macron a annoncé deux mesures pour que les femmes se remettent à faire davantage de bébés.
Congé de naissance en suspens
D’abord le « congé de naissance qui va remplacer le congé parental actuel ». « Il sera mieux rémunéré et permettra aux deux parents de rester auprès de leur enfant pendant six mois s’ils le souhaitent. » Une disposition qui pourrait être favorable à l’égalité professionnelle… Encore faut-il attendre sa traduction concrète. L’allongement du congé de paternité annoncé avec de grands effets de manches en 2021 se révèle peu attractif. (Lire : Congé paternité allongé : elles applaudissent, ils rechignent).
Pousser les jeunes femmes à enfanter vite
La deuxième annonce a fait bondir. Le président de la République a assuré : « la natalité baisse parce que l’infertilité progresse ». La seule raison qu’il a évoquée pour expliquer l’infertilité : « les mœurs changent, on fait des enfants de plus en plus tard. » Alors, il le prévoit : « un grand plan de lutte contre ce fléau sera engagé pour permettre le réarmement démographique de la France. » Autrement dit, les jeunes femmes vont devoir s’y mettre sans tarder.
Bien sûr le président a été largement critiqué pour ce discours sur la natalité que ne renierait pas l’extrême droite. Les écologistes ont souligné l’absurdité de politiques natalistes sur une planète déjà surpeuplée
Et les associations féministes ont réagi face à cette injonction. Faire des enfants pèse bien davantage sur les épaules des femmes que sur celle des hommes. Entre les grands coups de canifs dans leur vie professionnelle et l’augmentation inconsidérée de leur charge domestique et mentale, elles subissent des chamboulements que les hommes qui dirigent et décident ne veulent pas voir. La Fédération nationale des CIDFF (Droits des Femmes et des Familles) a dénoncé une ambition présidentielle qui « constitue une régression politique et sociale préoccupante. »
Le président a aussi dit vouloir « responsabiliser les mères monoparentales » … ce qui a donné lieu à une nouvelle pétition des mères solo qui demandent au contraire à l’Etat de commencer par assumer ses responsabilités.
Soigner l’endométriose… pour booster le PIB
Au lendemain de ce discours Emmanuel Macron s’est rendu à Davos pour le 54ème World economic forum, Forum économique mondial, dont LesNouvellesNews.fr soulignent chaque année la faible ouverture aux femmes (voir plus bas).
Et voici que cette année, cet aréopage de dirigeants politiques et économiques du monde s’intéresse à la santé des femmes ! Pas pour le bien être des femmes mais pour leur porte-monnaie. Un rapport de 40 pages sonne l’alerte : « La différence de prise en charge de la santé entre les femmes et les hommes coûte très cher ! »
Selon les calculs du Forum, chaque dollar américain investi dans la santé des femmes rapporterait en retour trois dollars de croissance, ce chiffre étant dû en partie au retour de femmes malades sur le marché du travail. Combler l’écart entre femmes et hommes permettrait d’enrichir l’économie mondiale de 1 000 milliards de dollars (920 milliards d’euros) par an d’ici 2040.
Ça fait très longtemps qu’il a été démontré que la médecine est pensée pour les hommes (voir plus bas) et que la santé des femmes en pâtit, mais jusqu’ici les grands de ce monde s’en contre-fichaient.
Le rapport rappelle par exemple que les inhalateurs pour l’asthme sont plus efficaces sur les hommes que sur les femmes et que, pour 700 maladies les femmes sont diagnostiquées plus tard que les hommes.
Certaines maladies spécifiquement féminines comme l’endométriose ont longtemps été ignorées par des décideurs qui refusaient de prendre en compte la douleur des femmes. Quant à la ménopause, les femmes n’avaient qu’à se débrouiller avec… Ces hommes lèvent un cil sur le sort des femmes s’ils en subissent les désagréments comme l’a récemment montré ce plateau 100% hommes devisant de la ménopause sur une chaîne d’info il y a quelques mois. (lire : Six experts, la ménopause et des époux satisfaits)
Mieux prendre en charge l’endométriose et la ménopause pourrait contribuer à hauteur de 130 milliards de dollars au PIB (Produit intérieur brut) mondial d’ici 2040.
Et pour boucler cette affaire de cynisme, notons que le rapport de 40 pages a été réalisé avec la participation de la société suisse Ferring Pharmaceuticals, qui commercialise notamment des produits en gynécologie et du McKinsey Health Institute.
Entre le « réarmement démographique » et l’amélioration de la santé gynécologique pour améliorer le PIB, les utérus vont être très convoités.
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