Des membres du Parti pirate s’alarment : le Parlement européen voudrait interdire la pornographie sur internet. C’est faire grand cas d’une résolution sur l’« Élimination des stéréotypes liés au sexe ».
Tempête sur le net : le Parlement européen s’apprêterait à bannir la pornographie ! C’est le député européen Christian Engström, élu suédois du Parti pirate, qui s’en inquiétait le 6 mars. La semaine prochaine, le Parlement européen sera appelé à voter une résolution sur l’« Élimination des stéréotypes liés au sexe ».
Plusieurs sites ont rebondi sur l’appel angoissé (ici en anglais) de Christian Engström. Ou sur celui plus grandiloquent (également en anglais) du fondateur du Parti pirate, Rick Falkvinge, qui y voit une « attaque effroyable » contre la liberté d’expression.
En France, Numerama écrit ainsi que le texte « a pour principal objet de lutter contre les discriminations entre hommes et femmes véhiculées dans la société » mais il « s’attaque aussi à la pornographie, avec la volonté de l’interdire. Y compris sur Internet. » Des députés européens ont été submergés de courriels outrés par des défenseurs de l’internet libre et du porno.
Du calme, messieurs. On en est bien loin. D’une part, il ne s’agit là que d’une résolution. Un texte sans valeur législative, qui a pour rôle d’interpeller la Commission européenne et les États membres. Sa rédactrice, la néerlandaise Kartika Tamara Liotard, y liste une série de domaines d’action – dans l’éducation, les médias et la publicité, le marché du travail et la prise de décision économique et politique – pour lutter contre les « stéréotypes liés au genre dans l’Union européenne, qui limitent les possibilités et les perspectives des hommes, mais plus encore des femmes » –
Ensuite, y voir un appel à interdire la pornographie sur internet relève du fantasme. Ce qui inquiète le député du Parti pirate, ce sont deux points sur les 69 que compte la proposition de résolution :
Le point 14 « souligne qu’une politique d’élimination des stéréotypes dans les médias passe nécessairement par une action sur le terrain numérique; considère à cette fin qu’il est nécessaire de lancer des actions coordonnées au niveau européen en vue de développer une véritable culture de l’égalité sur l’internet ; invite la Commission à élaborer, en partenariat avec les parties prenantes concernées, une charte à laquelle tous les opérateurs de l’internet seraient invités à adhérer ».
Une charte pour une culture de l’égalité. Ce n’est pas tout à fait l’interdiction du porno.
Le point 17, quant à lui, « invite l’Union européenne et ses États membres à prendre des mesures concrètes à la suite de la résolution du Parlement européen du 16 septembre 1997 sur la discrimination de la femme dans la publicité, qui réclamait l’interdiction de toutes les formes de pornographie dans les médias, ainsi que de la promotion du tourisme sexuel ».
Ah. Il est fait ici explicitement référence à l’interdiction de la pornographie. Mais dans le cadre de la publicité, et avant l’heure d’internet. Difficile d’y voir, 16 ans après, un signal caché appelant à bannir les sites pornos. A ce jour seule l’Islande, qui n’est pas membre de l’Union européenne s’interroge officiellement sur le sujet.
