Le jury de la Mostra de Venise a primé l’américain Jim Jarmusch. Mais c’est la tunisienne Kaouther Ben Hania qui fait le buzz avec un film-choc dénonçant les horreurs à Gaza.
Un réalisateur primé, une réalisatrice ovationnée, ainsi s’est clôturé le festival de cinéma de Venise samedi 6 septembre dernier. Le président du jury, Alexander Payne, réalisateur de « Winter Break » et accusé en 2020 d’agression sexuelle par l’actrice Rose McGowan, a précisé en conférence de presse que l’ex-aequo n’étant pas autorisé, le jury (paritaire) avait choisi de décerner le Lion d’or à Jim Jarmusch, pour « Father, mother, sister and brother ». Une histoire de famille portée par un casting impeccable, un film « tranquille » selon son réalisateur lui-même.

Intranquille, carrément indigné, est le nouveau film de Kaouther Ben Hania, qui repart avec le Lion d’argent, deuxième marche du podium. « The Voice of Hind Raja » revient sur meurtre d’une fillette de 5 ans à Gaza par l’armée israélienne, après des heures d’attente des secours coincée dans une voiture criblée de balles sous les corps des membres de sa famille. Les enregistrements téléphoniques des appels à l’aide de la petite fille auprès des secours du Croissant Rouge Palestinien font partie intégrante du film. Ovationnée lors de la projection pendant 23 minutes (l’autre compétition des festivals internationaux est celle du minutage des applaudissements), re-ovationnée lors de l’annonce de son prix à la soirée de clôture, la cinéaste a prononcé un discours déterminé, qu’elle a relayé sur les réseaux : « Le cinéma ne peut pas ramener Hind, ni effacer les atrocités commises contre elle. Rien ne peut réparer ce qui a été pris. Mais le cinéma peut préserver sa voix, lui faire traverser les frontières. Car son histoire n’est pas que la sienne. C’est celle tragique de tout un peuple, un peuple souffrant d’un génocide infligé par un gouvernement israélien criminel qui agit avec impunité ». Cet engagement , la réalisatrice tunisienne le porte depuis ses premiers films, chroniqués ici : violence familliale transmise de mère en filles dans « Les filles d’Olfa » (2023), la marchandisation de la vie humaine dans le monde de l’art avec « L’homme qui avait vendu sa peau » (2020), bataille pour la reconnaissance du viol en Tunisie dans « La Belle et la Meute » (2017), un de ses films les plus réussis.
« The Voice of Hind Rajab » devrait sortir en France le 7 janvier prochain. D’ici là, une autre voix dénonçant les horreurs de Gaza se fera entendre, celle de la documentariste Sepideh Farsi, avec « Put your soul on your hand and walk », en salles le 24 septembre prochain. L’engagement militant pro-Palestine est décidément aussi affaire de réalisatrices.
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