Le Parlement européen veut un nouveau cadre politique dans l’Union en matière de lutte contre la violence à l’encontre des femmes. La résolution, adoptée mardi 5 avril à Strasbourg, est un appel à la Commission : elle doit élaborer une directive pour harmoniser le droit européen face aux crimes sexuels.
« Les violences contre les femmes doivent être reconnues comme un crime dans toute l’Union, et leurs auteurs automatiquement poursuivis » : l’eurodéputée suédoise Eva-Britt Svensson (photo) résume ainsi le sens de la résolution dont elle est à l’origine. Consacré aux « priorités et la définition d’un nouveau cadre politique de l’Union en matière de lutte contre la violence à l’encontre des femmes », le texte appelle l’Europe à se doter d’un instrument de droit pénal commun contre les violences fondées sur le genre, du viol au harcèlement.
La résolution, adoptée à une large majorité par le Parlement européen, mardi 5 avril, insiste également sur le nécessaire renforcement de l’aide aux victimes. Il s’agit notamment de fixer des normes minimales pour assurer qu’elles bénéficient des conseils d’un juriste ; ou encore d’imposer que, pour 10 000 habitants, il existe au moins une structure spécialisée d’aide aux victimes.
Pour créer cet arsenal commun, la balle est désormais dans le camp de la Commission européenne. Dans le cadre d’un plan quinquennal pour l’égalité hommes-femmes, elle doit justement présenter dans le courant de cette année 2011 une stratégie de lutte contre les violences. Pour aboutir à une harmonisation juridique, le Parlement attend désormais qu’elle élabore une directive en ce sens. Eva-Britt Svensson entend la forcer à agir car, pour le moment, elle ne ressent pas une grande volonté : « Les réponses de la Commission au parlement restent floues, et il semble qu’ils préfèrent une approche à la carte plutôt qu’une stratégie cohérente », déplore la parlementaire.
Entre 20 et 25% de l’ensemble des femmes en Europe ont subi des actes de violence physique au moins une fois au cours de leur vie adulte et plus de 10% ont été victimes de violences sexuelles avec usage de la force, fait observer la résolution. Mais selon le pays où elles vivent, « les femmes dans l’Union européenne ne bénéficient pas d’une protection égale », déplore Eva-Britt Svensson. Les exemples de cette absence totale d’harmonisation sont légion. La Commission européenne les détaillait dans une étude (ici en anglais) publiée en 2010, dans la perspective d’une éventuelle harmonisation. Aperçu : Dans 9 Etats membres, les violences sexuelles infligées aux femmes n’entraînent pas des poursuites d’office. Et la police peut décider de ne pas classer la plainte dans les statistiques criminelles. Le spectre des peines encourues est lui aussi extrêmement large : dans les Etats qui ont des peines minimales, elles vont de 3 mois à 6 ans d’emprisonnement. Et les peines maximales vont de 9 ans à la prison à vie selon les pays. La notion de viol elle-même n’est pas claire – les législations divergent autour de la notion d’usage de la force, ou encore sur les circonstances aggravantes. La Lettonnie ne reconnaît pas la notion de viol conjugal. Et même si les 26 autres pays de l’Union la reconnaissent, « des distinctions procédurales plus subtiles » subsistent dans plusieurs d’entre eux. Pas plus de cohérence entre les 27 en ce qui concerne les définitions et les réponses pénales apportées aux autres formes d’agressions ou d’abus sexuels. On trouve même des situations « anachroniques », relevait la Commission. Ainsi, à Malte, il existe un délit « d’enlèvement avec violence ou intention d’abus sexuel ou de mariage», qui peut se régler en justice… par le mariage. |