Les inventeurs d’un gant-poubelle de protections périodiques ont trouvé un investisseur puis renoncé à leur projet. Les start-ups fondées par des femmes, elles, ont toujours du mal à se financer.
C’est une aventure entrepreneuriale qui fera date dans l’histoire du marketing genré contrarié par les féministes Deux start-uppers allemands, Andre Ritterswuerden et Eugen Raimkulow, voulaient créer un nouveau besoin chez les femmes. Les « Pinky Gloves » : des gants -roses bien-sûr !- destinés à tirer la ficelle des tampons périodiques ou à retirer les serviettes puis à être retournés sur ces protections pour les jeter proprement. Les deux hommes projetaient bien-sûr de vendre ces gants en plastique jetables à un prix exorbitant.
Pour mener à bien leur projet, les deux brillants cerveaux, avaient même trouvé très facilement un investisseur les soutenant à hauteur de 30.000 euros grâce à une émission pour startuppers de la télévision allemande à laquelle ils ont participé mi-novembre .
En présentant leur lumineuse idée, ils n’imaginaient pas la bronca qui allait suivre. « Nous comprenons vraiment les femmes » disaient-ils. Ils se souvenaient de ces instants où, habitant en colocation avec des femmes, ils avaient parfois « regardé dans la poubelle » de la salle de bain où des tampons et serviettes avaient été jetés. « Après un certain temps, ça ne sent pas bon, le papier toilette se désintègre et on le voit, c’est juste désagréable. » [Petit bichon !] Ils disaient vouloir créer un « sentiment de sécurité » pour les femmes et offrir quelque chose qui soit « attrayant et élégant ».
Créer des besoins…
En d’autres temps, l’aventure aurait suivi son cours. Les entrepreneurs soutenus par d’autres investisseurs auraient marketé leur produit pour le rendre indispensable, les distributeurs l’auraient mis en rayon avec force merchandising, la presse féminine en aurait fait un « must have » et les startuppers devenus riches auraient fait la une des journaux économiques.
Mais nous sommes en 2021 et grâce aux réseaux sociaux, les féministes peuvent mettre de gros grains de sable dans cette machine sexiste. Et elles n’ont pas ratés les entrepreneurs arrogants. De partout dans le monde affluaient des messages déplorant, outre l’aspect sexiste de la démarche, ses effets sur l’environnement. « Chaque jour il y a un nouveau produit inutile pour le vagin » a lancé sur Twitter la gynécologue américaine Jennifer Gunter, autrice de « The Vagina Bible » qui « aimerait leur envoyer à la figure » son livre. Même le journal conservateur allemand Die Welt, a souligné que le produit n’avait rien d’innovant et écrivait même « Il n’est pas surprenant que derrière Pinky, il n’y ait pas de femmes mais deux hommes, qui n’ont aucune expérience de l’usage des produits hygiéniques »,
Pas de financements pour les start-ups des femmes
Les deux hommes en question ont mis du temps à comprendre. « Nous n’avons pas adressé le sujet de manière adéquate. C’était une grosse erreur. Nous prenons vos commentaires très au sérieux et nous allons repenser notre produit et réfléchir à toute l’histoire de sa création » ont-ils d’abord déclaré. Puis ils ont renoncé à leur projet quelques jours après, fin avril… Mais ils se sont félicités d’avoir d’une certaine manière lancé un débat important !
Cette victoire contre le marketing sexiste est cependant loin d’être une victoire totale contre le sexisme. Comme le fait remarquer Angela Priestley fondatrice du Women’s Agenda (Australie) « Seulement 2,8 % des financements de capital-risque à l’échelle internationale sont allés à des startups dirigées par des femmes en 2019, un chiffre qui a chuté à 2,3 % en 2020. » Elle ajoute « Il est révélateur que la même émission de télévision qui a accordé aux bailleurs de fonds masculins de « Pinky Glove » le soutien dont ils avaient besoin pour aller de l’avant, n’ait accordé aucun investissement à Ooia, une startup berlinoise qui vend des sous-vêtements périodiques et des soutien-gorge d’allaitement. »
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