L’inauguration récente de la PMI Bronia Dluska, sœur de Marie Curie, met un coup de projecteur sur cette grande scientifique encore trop méconnue. Voici comment la « Médecin des femmes » est sortie de l’invisibilité.
Saviez-vous que Marie Curie avait une sœur ? Son nom est Bronia Dluska. « Médecin des femmes », elle connaît désormais la reconnaissance publique qu’elle mérite. Depuis le 12 décembre 2023, un centre de Protection Maternelle et Infantile (PMI), situé rue de la Banque à Paris, porte son nom. « Le combat contre l’invisibilité des femmes est le nôtre. Chaque sortie d’ombre est une victoire. Bronia Dluska fait désormais partie de notre matrimoine » écrit l’élue de la mairie de Paris centre Shirley Wirden sur Instagram.
Qui était Bronia Dluska ?
Mais cela n’aurait pas été possible sans les travaux de Natacha Henry. C’est en 2015 que l’autrice fait jaillir Bronia Dluska des méandres de l’Histoire. Dans son livre « Les Sœurs savantes », puis dans « Marie et Bronia, le pacte des sœurs », Natacha Henry dresse le portrait d’une femme fascinante et, avant tout, déterminée. « Sans Bronia Dluska, il n’y aurait pas eu de Marie Curie, déclare Natacha Henry, avant de s’enthousiasmer de l’inauguration de la PMI : Je n’aurais jamais imaginé qu’elle bénéficie d’une reconnaissance aussi grande ».

L’autrice est la première à s’être intéressée au lien qui unissait les deux sœurs. « Dans leur jeunesse, Marie et Bronia lient leur destin lors d’un pacte : la première restera en Pologne, travaillera, afin que la deuxième puisse étudier la médecine à Paris. À cette époque, l’accès à l’université était interdit aux filles dans leur pays d’origine. Selon leur plan, Marie rejoindra sa sœur une fois que Bronia sera diplômée et pourra subvenir aux besoins de Marie. » explique Natacha Henry. À chaque étape importante de la vie de Marie Curie, Bronia Dluska est présente. C’est ainsi que l’autrice remonte le fil et (re)découvre la vie palpitante de cette dernière. « Il existe très peu de documentation sur la vie de Bronia. D’ailleurs, beaucoup ignorent que Marie Curie avait une sœur. Leur vie est pourtant liée sur tellement d’aspects ». Les deux sœurs s’inscrivent ensemble à l’université volante lorsqu’elles résident encore en Pologne, Bronia accueille et loge sa sœur lors de son arrivée à Paris, après être allée la chercher en Pologne quand Marie songeait à renoncer à faire des études à Paris. Puis Bronia Dluska cofondera et dirigera l’institut Marie Skłodowska-Curie à Varsovie. Pourquoi cette dernière a-t-elle été oubliée, alors même qu’elle était reconnue de son vivant ?
Une reconnaissance tardive
« Comme beaucoup de femmes qui ont entrepris des choses courageuses, l’Histoire les a effacées » déplore Natacha Henry. L’autrice souhaite alors rendre justice à Bronia Dluska. Un projet pas si évident, alors même que personne n’avait jamais entendu parler d’elle : « Je le publierai si vous me prouvez que le lien qui a uni Marie Curie et Bronia Dluska a duré toute leur vie », lui lance son éditeur. L’autrice s’envole alors pour la Pologne, sur la trace de cette famille extraordinaire, rencontre les petites nièces et arpente les bibliothèques universitaires et de médecine à la recherche d’archives. Un travail titanesque pour faire revivre celle qui a consacré sa carrière à soigner les femmes. « Je ne pensais pas découvrir autant de choses. J’ai, par exemple, retrouvé sa thèse sur l’allaitement maternel. C’était fantastique » se remémore Natacha Henry.

Les recherches de l’autrice ont ainsi permis de revaloriser cette figure féminine oubliée… et cela en a inspiré plus d’une. Shirley Wirden, élue à la mairie de Paris Centre, fascinée par cette histoire, met tout en place pour que la PMI Banque (située rue de la Banque à Paris) soit rebaptisée au nom de Bronia Dluska. Ces centres de Protection Maternelle et Infantile sont des dispositifs publics, en libre accès aux femmes, aux mères et à leurs enfants, afin d’assurer leur protection sanitaire. Pour Natacha Henry, c’était une évidence que Bronia Dluska y soit associée : « Dans son travail de gynécologue, il y a une véritable dimension sociale. Elle exerçait surtout dans des quartiers populaires et soignait des ouvrières, des femmes d’ouvriers et toutes celles qui pouvaient en avoir besoin ».
Bronia Dluska rejoint ainsi sa sœur Marie Curie dans le panthéon des femmes scientifiques et trouve une reconnaissance institutionnelle, dans l’espace public. Il faudra encore beaucoup de travaux d’historien.nes et de détermination d’élu.es pour mettre à l’honneur d’innombrables grandes femmes scientifiques oubliées…
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